ACCEO est une entreprise montréalaise bien peu connue. Elle est pourtant présente dans la vie quotidienne de la plupart des Québécois, du moins en arrière-plan.
Ses logiciels facilitent la gestion des garderies. Ils traitent les paiements par carte dans d’innombrables commerces. Ils permettent de réserver un voyage en ligne et même de produire des constats d’infraction. Difficile de passer à côté !
Les origines d’ACCEO remontent à 1988. Alors âgé de 30 ans, Gilles Létourneau a mis sur pied Conceptum, une firme de services-conseils en informatique. Sept autres firmes en découleront, dont Cognicase, vendue en 2003 au géant CGI pour plus de 300 millions.
Au tournant de l’an 2000, M. Létourneau a décidé de se tourner vers le développement de logiciels, plus rentable que le conseil.
« Au moyen d’acquisitions, je voulais constituer une société importante qui allait durer dans le temps. » – Gilles Létourneau, pdg d’ACCEO
Après une longue recherche d’investisseurs, l’entrepreneur a cédé 60 % du capital de Conceptum au groupe français GFI Informatique en 2004. Devenue GFI Solutions, l’entreprise a finalement pu se lancer dans une série d’acquisitions, parmi lesquelles une division de BCE, Bell Solutions d’affaires, et une firme de Québec cotée en Bourse, Fortsum. La taille de l’entreprise a triplé.
Mais en 2011, Gilles Létourneau a senti que les priorités des actionnaires français avaient changé, en raison notamment des difficultés économiques en Europe. « Ils refusaient systématiquement les projets d’acquisition que je leur soumettais », relate le dirigeant dans son bureau de la Cité du multimédia. Avec le Fonds de solidarité FTQ, Investissement Québec, Capital régional et coopératif Desjardins et des cadres, il a racheté la participation de Gfi Informatique pour 75 millions. Dès la clôture de la transaction, M. Létourneau a procédé à deux acquisitions qui étaient en suspens depuis des mois.
Rebaptisée ACCEO à la fin de 2012, l’entreprise dessert aujourd’hui plus de 60 000 clients grâce à ses dizaines de logiciels différents. Sa suite de comptabilité Acomba domine le marché des PME québécoises. Pas moins de 60 % des grands détaillants canadiens utilisent son logiciel de paiement Tender Retail. Et ses logiciels UniCité sont omniprésents dans les municipalités du Québec.
DIVERSIFICATION
ACCEO n’est-elle pas trop éparpillée ? Gilles Létourneau assure que non. « Les compétences que nous développons dans un domaine sont transférables ailleurs, dit-il. Par exemple, comme nous maîtrisons de bout en bout les mécaniques complexes du paiement électronique, nous pouvons offrir des solutions complètes de commerce en ligne aux commerçants et aux municipalités. »
L’entreprise vient d’élargir encore son champ d’action en mettant la main sur la firme montréalaise Gtechna, qui conçoit des systèmes de gestion de stationnement et de lecture à distance de plaques d’immatriculation. Gtechna a des clients au Canada, aux États-Unis, au Mexique, en Australie et en Malaisie.
M. Létourneau rêve d’une nouvelle prise d’envergure en Amérique du Nord. « Les entreprises de plus de 5 millions de revenus qui sont à vendre sont très rares », constate-t-il. Nous avons récemment fait une offre pour une entreprise de l’Ouest canadien. Si ça fonctionnait, ce serait une acquisition transformatrice. »
L’objectif à moyen terme est de passer d’un chiffre d’affaires de quelque 120 millions à plus de 175 millions. Quand ce seuil sera franchi, Gilles Létourneau songera à un premier appel public à l’épargne pour ACCEO.
« Nous investissons beaucoup en développement et ce n’est pas toujours apprécié en Bourse, note-t-il. Mais comme nous avons déjà réécrit plusieurs des logiciels d’anciennes générations, ces investissements iront en diminuant au cours des prochaines années. »
ACCEO EN BREF
Près de 1000 employés
Chiffre d’affaires de plus de 120 millions
Plus de 60 000 clients
Actionnaires d’ACCEO
Fonds de solidarité FTQ (38 %)
Investissement Québec (28 %)
Capital régional et coopératif Desjardins (20 %)
Cadres de l’entreprise (14 %)
FORCES
Parts de marché élevées dans plusieurs secteurs
Faible endettement
FAIBLESSES
Forte concentration des revenus au Québec
Ressources limitées devant des concurrents de taille
Sylvain Larocque – La Presse